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je vis, je dis, je ris ...ou pas
19 septembre 2010

La pro a l'air niais

J'ai lu, entre un reportage sur les tendances de l'été 2012 (le credo de la mode étant de nous faire rêver, non point de nous ancrer dans un précoce et cruel automne dont le givre matinal sied si bien avec mon blouson vieux de 10 ans) et un interview exclusif de Elodie Bouchez (qui répéte mots pour mots ce qu'elle a réservé pour "femme actuellement en train de flénarder 5 mn avant de préparer le diner"), un article prometteur dont le sujet était "comment écrire comme une pro".

Comme il ne spécifiait pas de quelle pro il était question, (cela aurait été comme un médecin, je n'aurai pas persisté dans l'apprentissage, sachant parfaitement me rendre illisible de tout lecteur assez patient pour tenter d'égaler Champollion (j'ai cependant un bon saucisson dans le frigo si quelqu'un souhaite relever le défi)), j'ai tendu attendivement les yeux afin de dégoter les astuces capables d'attirer le chaland, plus exactement, n'ayant rien à vendre, si ce n'est une voiture partant en ruine et grinçant dangeureusement dans les virages (grincements traduisant certainement les cris de frayeur d'une voiture malmenée), d'attirer le nonchalant.

1°) Parler d'un sujet suffisamment intéressant pour que le lecteur ne s'enfuit pas au bout de trois lignes, voire trois mots, lorsque ces trois mots sont "Cogito, ergo sum", parce que le lecteur, qui en a perdu son latin, va penser "ergo, urgo, pansement, malade, zut c'est l'heure que je télécharge, dans la légalité la plus totale du fait que la circulaire n'est pas diffusée auprès du grand public, la saison 10 d'Urgences".

Comme, malgré ma lecture assidue de "Elle", de "Grazia", de "Marie - Claire et du "Nouvel Obs" (où les modéles sont plus débonnaires et prosaïques, dénotant un certain laissez - aller regrettable), je suis toujours surprise par la quantité de gens connus dont j'ignore l'existence et dont tout le monde semble ignorer l'activité, je ne puis point aborder le sujet qui fait bondir l'audience et transforme un blogeur insignifiant en une célébrité incontournable, dont j'ignore l'existence et dont tout le monde semble ignorer l'activité : je veux parler des people, des stars, des météores, des fusées de détresse, des trous noirs. Il parait qu'il suffit de faire des suppositions sur la relation entre Brad Pitt et Angelina Jolie pour que le lectoramétre explose. Mais de Brad Pitt, je sais juste qu'il est une pâle copie de mon mari, avec les kilos en moins et d'Angelina Jolie, que mon mari n'aurait pas de scrupule à prendre la place de Brad Pitt.

Bref, mon sujet intéressant, qui va passionner les foules parce que cela fait toujours grimper aux rideaux c'est :

"Vous avez vu comme les araignées sont grosses, cette fin d'été ".

2°) Le lecteur doit, après la lecture du billet passionnant, avoir enrichi sa culture personnelle. Il peut toujours pour cela, préferer faire des mots croisés ou aller planter des tomates. Mais il se trouve que nous avons affaire à une personne qui a décidé de bouder les encyclopédies pour confier son évolution neuronale à l'université chaotique du savoir internétien, sans se soucier de la véracité de la source du moment qu'elle l'interpelle (cela nous change de l'actualité où c'est plutôt la source qui est interpellée).

Cher lecteur, qui veut donc s'enrichir, sans monnaie débourser (si ce n'est le prix d'un abonnement qui fait tellement tabac, que le gouvernement songe à lui appliquer la taxe anti - fumiste), je vais t'apprendre que l'araignée est dotée de huit énormes pattes, bien poilues, ce qui fait qu'elle ne peut être classifiée dans la catégorie insecte, comme me le fait toujours remarquer mon mari si délicat quand je m'exclame "je déteste les insectes et les araignées". Il me rétorque, de mauvaise foi, "l'araignée n'est pas un insecte", à quoi je lui réponds que "j'ai dit "et les araignées ; "et" est une conjonction coordinatrice, comme "mais", "où", "donc", "or","ni","car" et "placard", qui exprime l'adjonction, la succession mais aussi l'opposition. Et comme chacun sait, rien ne s'oppose autant qu'un insecte au fait que l'araignée le prenne dans sa toile.

C'est donc une bestiole sournoise, qui surgit hors de la nuit et quand elle parait, les femmes effrayées fuient tremblantes, criant le nom de leur chéri afin qu'il vienne, de la pointe de sa pantoufle, signer le sort de ce non-insecte. Et comme souvent, le mari rechigne (non pas pour soutenir la cause des animaux mais parce qu'il est devant un documentaire passionnant sur le brame des cerfs), la femme est obligée de saisir la pelle et la balayette, de s'approcher courageusement du monstre, en lui susurrant des mots gentils et rassurants, et en trois secondes, de l'emprisonner dans une serre de poils en plastique rèches mais, pour lui, si familiers, puisque, si souvent, ils sont venus chatouiller sa toile, d'ouvrir la porte d'entrée (ou de sortie en l'occurence), de le jeter dehors, de constater, avec soulagement et un reliquat de conscience charitable, qu'il est toujours vivant, de refermer bruyamment la porte (ce qui forcera le mari à se lever et à féliciter bruyamment la guerrière) et de respirer à grandes goulées, avant de constater que, punaise, dix mouches en ont profité pour s'engouffrer.

3°) Le rédacteur doit utiliser des mots simples, didactiques mais syntaxiquement compréhensibles par un lecteur qui n'a peut être pas été plus loin que le mot "abandon" dans le dictionnaire.

Bouh, ça fiche la trouille, les araignées, surtout qu'elles ont une taille à rendre jaloux Rocco Sifredi. Et ça pique que la souffrance, elle est pire que la douleur que j'ai eu quand j'ai appris que Carla allait quitter Nicolas. Tu savais pas ça que Carla Mitoni quittait Nicolas Sarcophage. C'est triste, quand même, la vie. C'est la fatalité : y'en a que les araignées elles les piquent et que trois semaines après le bouton il est encore douloureux ; y'en a d'autres les femmes on leur pique et que trois semaines après, ils sortent avec une autre.

4°) Le billet ne doit pas être trop long pour ne pas décourager le lecteur dés le départ et il doit jouer avec la présentation pour lui donner envie de débuter le chemin vers l'érudition (c'est comme pour un fim policier, si tu sais d'avance qui est l'assassin, c'est que tu es face à Colombo et tu peux sans reproche créer un impaire en le négligeant).

Je remercie l'araignée Gypsi, sans qui mes jours de pluie auraient été d'un ennui profond.

Je remercie l'araignée au plafond, sans qui mon mari ne pourrait jamais dire du mal de moi.

Je remercie l'araignée du matin, sans qui je n'aurai jamais su d'où venait mon chagrin.

Je remercie l'araignée du soir, sans qui je n'aurais jamais su que je pouvais bondir si haut.

Qui tisse sa toile, séme ses lecteurs.

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