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je vis, je dis, je ris ...ou pas
5 janvier 2011

Le mâle a dit

                      L'année s'est terminée en toussant. Alitée sur le canapé, ma chair fragile frissonnant sous dix couvertures apportées par des enfants compatissants (dont une poussait l'empathie jusqu'à tousser sombrer avec moi dans les limbes d'un sommeil capitonneux, pendant que l'aîné faisait le fanfaron avant de succomber à la maladie 3 jours plus tard, nous ne parlerons pas du petit, propagateur de ce virus virulent), je me sentais abandonnée par un mari absorbé par la sculpture d'arbres d'autant plus miniatures qu'il est le seul à les voir. A peine vint-il à s'approcher de mon être transi : une fois pour monter le chauffage (ce dont j'aurai pû le remercier si je n'avais pas été trop engourdie pour décongestionner mon cerveau), une seconde pour se plaindre qu'il souffrait d'un léger grattement de gorge.

                      Pourquoi lorsque la femme est malade, l'homme se souvient du sermon sentencieux qui envisage le mariage comme un long chemin de croix semé de disputes et de remontrances : "pour le pire et le meilleur",  et décide lui qui, refuse de donner le code de sa carte bancaire (le meilleur), de partager les microbes (le pire) et d'en faire un événement claironnant. La femme est malade : elle s'en remettra, d'autant plus vite qu'il y a le diner à préparer. L'homme ne peut pas laisser la femme seule à être malade et vite, il fera en sorte de tousser, renifler et le summum, avec de la fièvre ! La femme restera couchée, éreintée mais elle ne parviendra pas à atteindre le degré 40 du thermomètre, elle ne parviendra pas à appeler sa mère d'une voix geignarde pour l'affoler en lui apprenant que tout le monde est malade mais lui encore plus que les autres, que oui, elle peut lui apporter de la soupe aux légumes frais, oui, il a mal...mais il restera fort et il va juste prendre la place de sa femme sur le canapé : il faut bien qu'elle s'occupe des gosses.

                    La femme tousse mais l'homme tousse plus fort. La femme se plaint de maux de tête, l'homme d'un trou béant dans le crâne. La femme doit céder : l'homme est LE malade. L'homme s'égratigne, se cogne, se coupe, se couche et toute la maisonnée doit l'entendre arborer sa poupée, brandir sa blessure, craindre l'amputation, interpeller le médecin. La femme prend un pansement, un cachet et attend que ça passe. Parfois, énervée par tant de douilletterie, elle souhaite qu'une seule fois dans sa vie il connaisse les douleurs de la menstruation (pas de l'accouchement, sinon il exigera l'euthanasie).

                    Cette hyperbolation de la maladie se trouve très tôt chez l'individu mâle. Pas tout petit où le "même pas mal" masque les larmes contenues. Un peu plus grand et alors la moindre écorchure fait l'objet d'un rapport circanstancié employant toutes les expressions synonymes de torture et d'agonie. Le moindre accès de fièvre et l'adolescent vous sort son regard de cocker battu, vous demandant compassion et combien de temps avant qu'il succombe. L'adolescente déjà, elle, n'a rien compris au film et vous déclare avec le sourire qu'elle a mal au ventre puis va se coucher dans son lit où vous la retrouverait, le soir venu, toute tremblante et transpirante. Le gars lui se pliera en deux, s'accrochera à vos jambes en pleurant, vous décrivant une douleur qui correspondrait à un fauchage de tête suivi d'un écervelage sauvage pour finir par un écrabouillage catchien. Vous vous précipitez alors sur le téléphone pour appeler les urgences, vous obtenez un rendez vous immédiatement, vous allumez les girophares (en fait, le gamin qui hurle à la mort). Le docteur qui, sur les suggestions de son assurance, se contente de palper au minimum son patient, se décharge en vous sommant de le convoyer à l'hôpital. A l'hôpital, les infirmières le gardent en observation la nuit, le prélèvent, le piquent, le charment d'où une moindre douleur et une démonstration d'un stoïcisme qui les ravit. Conclusion : pas d'appendicite, peut être un virus, rien d'alarmant, ramenez - le chez lui en prenant garde de bien effacer les traces de rouge à lèvres.

                     Conclusion : face à la maladie, la femme serre les dents, l'homme desserre la bouche.

ps : je tousse encore, mais chut, cela pourrait donner des sueurs à mon mari !

ps 2 : Hippolyte a bien fait un séjour à l'hôpital pour un crampe de ventre "abominable" et il a bien sorti son sourire le plus ravageur devant les jeunettes en blouse (question de mon père : que fait-on des vieilles infirmières ? ). C'était son cadeau d'anniversaire (c'était ça ou le scooter !)

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Commentaires
P
d'autant que c'est tellement vrai!!<br /> J'essaie donc de n'être jamais malade..
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M
J'ai un homme hypocondriaque qui se gargarise au Doliprane 1000 et qui balance dans le caddie des tubes de vitamines. Il veille beaucoup (trop) à sa santé journalière mais je dois avouer qu'il me fait de divins gommages à la plage, avec le sable sur place à volonté, qu'il me masse les varicosités aux huiles essentielles et qu'il a massé nos enfants avec de l'arnica chaque fois qu'ils pleuraient de croître douloureusement des jambes ... <br /> Et quand j'ai la migraine monstrueuse et que je tente de dégueuler de 23 heures à 2heures du mat pour finalement cracher deux glaviots ... et bien il est plutôt gentil, mais bon, je m'arrange aussi pour être malade la nuit !
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L
Suis encore sous l'effet de ma gastro, mais je me marre (tant pis) comme un fou. C'est vrai que les hommes n'acceptent pas que LEUR femme soit malade, y a du boulot!! Qu'est ce que j'ai pu magouiller pour la faire sortir du lit lorsque la grippe lui tombait dessus grâce à l'un de mes schtroumpfs.<br /> Bises réparatrices.
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