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je vis, je dis, je ris ...ou pas
14 octobre 2011

Il était une fois un grand voyageur

Mon mari est devenu un grand voyageur. Il part et je l'attend, l'âme en peine, espérant son retour, retenant mes larmes pour ne pas troubler des enfants, enchantés de ma perte d'autorité. Je ne crains que le naufrage de notre couple.

Bon, il n'est parti que deux fois, pour des expéditions peu sauvages, où le plus ardu fut d'affronter les tracasseries douanières et les traductions non instantanées. Bon, sur ces deux fois, une seule lui permit de fouler le sol étranger et de se rendre compte que le français était une langue plus que surannée. Bon, cela n'a pas dépassé les trois jours et je n'ai rien trouvé de suspect sur son portable (bon, je ne sais pas m'en servir et j'ai juste constaté qu'il avançait de deux minutes).

Mon mari, grand baroudeur, a donc été envoyé en mission en espagne et en est revenu avec une information capitale :" la agua es por las ranas". Il a découvert une nouvelle vertu au vin : après quelques bouteilles, la langue devient fluide, l'oreille attentive, l'épanchement facile, la femme devient mujer et les mots prennent un sens universel.

Bon, en espagne, il n'a pas fait que boire, il a aussi manger...la même chose qu'en France, avec peut-être un soupçon d'olives en plus ; la même chose qu'il mangera quand il ira à Porto (avec peut - être un soupçon de poils en plus), à Francfort (avec peut - être un soupçon sur la qualité en plus), à Amsterdam (avec peut être un soupçon de la police en plus).

Oui, car monsieur va continuer à pérégriner sur le continent européen, montant à bord de gros navions qui volent haut dans le ciel, brandissant son sachet transparent aux aéroportiers pour montrer pâte dentifrice blanche, soignant sa barbe blonde pour ne pas passer pour un terrorriste scandinave, descendant avec des hommes d'affaires affairés qui volent haut dans la magouille et bas dans les sondages.

Il faut l'écouter mon mari, s'animant, décrivant avec force postillons et mouvements de bras excessifs, sa traversée du dessert professionnel, sa lancée sur la rampe de l'ascension vers l'augmentation graalique. Il a surmonté les vigiles vigilants, les hotesses hautaines,  les plateaux repas "pascequecest", les cartes magnétiques muettes, les visiteurs de salons trop bavards, les chambres trop confortables, les rencontres hasardeuses, les tentations fugaces, le cadeau paspensé, le répit célibataire, les haltes prolongées, le retour au bercail. Il a bien mérité d'être salué pour sa témérité d'itinérant, sa faculté à s'adapter aux rotondités des langages les plus âpres, sa volonté de revenir vers sa femme et sa capacité à lui avouer qu'elle lui a manqué.

Bon, ses enfants se sont à peine rendus compte de son absence et son épouse lui en a surtout voulu de lui avoir laissé un lit vide et froid.

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