La mort aux dents longues

Les inventions qui auraient eu besoin qu'un inventeur se penche sur leur cas :

SPECIAL TOUSSAINTS

- l'alarme anti-vie : la hantise de chacun, à part se promener la braguette ouverte ou la jupe relevée dans le collant, est d'être enterré vivant. Plus de soucis avec cette alarme qui réveillerait un mort. Si jamais vous ouvrez les yeux dans ce qui vous semble un placard étroit, plus ou moins confortable en fonction des relations que vous entreteniez avec vos ex-héritiers, ne paniquez plus en vous époumonant pour qu'on décoince la poignée, laissez agir l'alarme anti-vie connectée à votre pouls. Elle émettra à la moindre pulsation un bruit strident qui provoquera quelques crises cardiaques parmi les visiteuses chroniques du cimetière (permettant ainsi aux pompes funèbres de faire d'une pierre tombale deux coups juteux et aux maisons de retraite de réduire leur liste d'attente) et liée à une centrale informatique, informera l'employé municipal préposé qu'il doit laisser Mfouet2012 et Love666 avec qui il discutait de l'influence de la pensée apocalyptique sur les structures natalistes, pour appeler un marbrier, un médecin, un ami avocat, avec lequel il s'est entendu sur un pourcentage, afin d'aider la famille à remplir et envoyer les formulaires pour dépôt une plainte, et un psychologue afin de soutenir l'ex-défunt et la famille à supporter une résurrection pas toujours bien accueillie.

- l'anti-vol chrysanthèmes : Marre que des gens sans scrupule piquent les chrysanthèmes que vous avez achetés à prix très compétitifs, grâce à vos talents de négociatrice chevronnée (vous en avez obtenu 10 pour le prix de 5, vous aviez donc consenti à fleurir la tombe de votre belle-mère, avec le plus chétif, en vous jurant d'oublier de l'arroser en représailles de son poulet au curry soit disant qu'elle cuisinait mieux que vous, et voilà qu'un malappris l'a dérobé avant que vous ne mettiez votre vengeance en non-application), Dontetouch est fait pour vous. Dontetouch est un ingénieux mécanisme, agréé par les associations catholiques : lorsqu'un malotru tentera de s'approprier le fleurissement d'un autre et martelera de ses gros pouces déformés par l'envie le pot du chrysanthème, un squelette holographique surgira, scandant une malédiction générationnelle et l'effroi pouvant être fatal au pot, deux gardiens, déguisés en ange, saisiront le fautif, l'éloigneront de sa proie et le persuaderont, avec des arguments de poids,  de se rendre à la messe tous les dimanches. Grâce à Dontetouch, vos chrysanthèmes seront à l'abri et nos églises se rempliront.

- l'aide-condoléances : vous ne savez jamais quoi dire aux personnes en larmes devant lesquelles la bienséance (et le sens de la visite) vous oblige à passer et à serrer les mains. Vous n'êtes pas une vieille dame, déchiffrant à la loupe les avis d'obséques dans l'espérance qu'une consonnance connue ou un drame suffisamment affligeant lui permette de sortir de la naftaline son plus beau costume noir afin de respirer la tristesse du beau monde. Mal à l'aise, vous avez tendance à éclater de rire pour cacher votre nudité de mortel. Aidetoi est fait pour vous. Aidetoi est un microparleur miniature. Il vous suffira d'appuyer sur la touche qui convient afin d'être le parfait convive d'enterrement. Touche 1, air absorbé : lecture de romans pronographiques ; touche 2, air compassionnel : diffusion de l'émission 30 millions d'amis ; touche 3, air larmoyant : écoute d'un épisode de la petite maison dans la prairie ; touche 4, grosses larmes : transmission d'un match du PSG ; touche 5 : air extatique : bruits d'eau qui coule vous donnant une grosse envie d'uriner ; touche 6, message 1 de condoléance : "toutes mes condoléances" ; touche 7, message 2 de condoléances : "avec mes sincères condoléances"; touche 8, message 3 de condoléances : "toutes mes sincères condoléances", touche 9, message 4 de condoléances : "C'était quelqu'un de bien" (même si c'était la pire ordure, de toute façon, les héritiers sont pressés d'aller fêter ça) ; touche 10, message 5 de condoléances : "En même temps, s'il n'était pas mort, on ne se serait pas revu."