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je vis, je dis, je ris ...ou pas
30 décembre 2011

Comment passer de victime à criminelle

Encore une illustration que l'ordre et la justice ne raméneront jamais l'agneau égaré vers la bergerie rédemptrice, en ne faisant appel qu'à sa frayeur. Je me promenais sereinement dans les rayons d'un supermarché d'une petite ville de campagne paisible, remplissant courageusement mon chariot de victuailles, m'agressant à coups d'étiquettes et de promotions chocs, hésitant à m'enquérir d'un article nouveau sachant combien il serait ignoré par des triplés affamés,  tellement ancrés dans leurs habitudes, qu'à chaque fois que les petits suisses "les p'tits filous" changent d'emballage, il faut bien 1 mois pour que mon fils aîné ose s'en approcher sans crainte et reconnaître que le goût n'a pas changé.

Je vaquais sans crainte dans cette moyenne surface éblouissante de banalité, même si lorsque, par maladresse, je heurtais le caddie d'un client, celui-ci me jetait un regard glacial, à se demander si noël n'avait pas perdu son sens de la convivialité et n'était plus qu'une fête où se terrait en attendant la fin du monde. Comme mon sac en bandoulière me génait dans mes mouvements de consommatrice zélée, surtout que j'étais surtout attirée par les produits hors-marques du magasin et donc camouflés en haut ou en bas des rayons, me permettant ainsi d'économiser une séance de flexion-extension dans un club dispendieux, où, soit dit en passant, vous vous tapez la honte, ou vous vous tapez le prof de gym, je l'avais négligemment accroché sur le crochet malicieusement placé devant le chariot.

 Ainsi délestée, je pouvais prestement doubler les grands mères qui s'étaient croisées à carrouf hier et reprenaient vaillamment leur discussion  sur la hausse du coût de la vie, vivement saisir mes 48 yaourts hebdomadaires sous le menton tremblotant d'un grand père fixant un pack de 4 flanby, en pensant que cela lui ferait un bon dessert pour son réveillon et que les trois autres lui dureraient  bien le mois entier, longuement hésiter entre des cacahouettes sucrées ou salées avant de me décider pour les deux, sous l'oeil méchant d'une femme ordonnant à son mari de prendre les apéritifs les moins chers possibles, estimant que le plus beau cadeau que les Durand et les Dupont pouvaient lui faire pendant les fêtes, c'était d'être moins bons vivants et que deux bouteilles de schnaps verdâtres suffiraient à leur faire comprendre que les douze coups sonnés, fallait qu'ils se transforment en Cendrillon et z'ont pas intérêt de laisser trainer leurs sales godasses.

Quand soudain un homme baraqué, patibulaire, peu sympathique, droit dans ses souliers crottés, vu le temps exécrable du monde extérieur, m'interpella d'une voix de stentor incorruptible , comme quoi j'étais inconsciente de laisser mon sac sans défense, sous la tentation d'un bandit des grands chemins. Et de me sortir sa plaque que je ne pris point le temps d'étudier pour savoir si, en fait, il cherchait juste à impressionner la femme qui l'accompagnait. On se serait cru à Miami et je m'attendais presque à entendre une fusillade, Marcello Strombino ayant enfin réussi à démasquer l'agent du FBI, infiltré à Mousquetaireville afin de découvrir qui, des russes ou des écossais, étaient à l'origine du saumon caviardisé qui ruinait la ménagère de moins de 50 ans.

Sous la coulpe de la loi, je me transformais aussitôt en rebelle à casquette et lui aurais bien jeté quelques pavés si je ne m'étais pas trouvé au rayon des pains au chocolat. k'est-ce-que t'as, toi, à sauver une innocence de son innocence ? Et si j'ai envie de croire que je peux me balader dans les rayons d'un supermarché en sécurité, sans crainte qu'un voleur s'empare de mon sac à main, dont, au demeurant, j'aimerai bien changer, mais que je ne peux point honnétement, parce que c'est mon mari qui me l'a offert. On n'est pas à Marseille là ! On est à Tristouville et j'ai toujours laissé ma voiture ouverte, mes gosses dehors et mes kilos en trop, sans que jamais personne n'ait eu l'idée de les faire disparaître. Relax, max et si un mec chourave mon porte feuille, il en profitera une journée, mon assureur en profitera pour se défausser, et moi j'en profiterai pour refaire mes photos d'identité en espérant que cette fois j'aurai l'air moins défoncé. Même les photos de famille, il peut les garder, j'ai les mêmes en vrai !

J'étais donc remontée (surtout que j'étais en retard) et en ais oublié d'acheter leur pain qui gratte (dixit mon fils qui adore se frotter dessus, en s'étonnant qu'il soit le seul à en manger). Je passe à la caisse, range mes achats dans ma caisse (j'm'imagine encore à Desesperadosville) et vais pour déposer mon caddie. Et là, que vois-je ? Quelqu'un avait oublié des sacs de course accrochés au malicieux crochet, déposé tentatricement devant le chariot, dans lequel je voulais m'incruster. Ah l'ironie du sort !

Mon ange dit : laisse-les, peut être que l'étourdi va s'en rendre compte et se précipiter pour récupérer son bien. Mon diable ricana : Si tu n'en profites pas, cela sera le suivant et celui-ci, sans scrupule, n'aura même pas une pensée tristounette pour celui qui vient ainsi de gâcher son réveillon. J'ai pris les sacs et suis partie en direction du magasin dans l'intention de les rendre en espérant que le bonhomme aurait foi en l'humanité et ira confiant à l'accueil pour réclamer son dû. Et puis j'imaginais que la femme de l'accueil allait soit y garder pour elle, soit  replacer ces maigres trésors au rayon approprié pour les revendre à prix d'or. Alors j'ai juste regarder ce qu'il y avait dans ses sacs et si c'était quelque chose que mon mari aimait, je lui ramenerai en prévision d'une bonne engueulade sur mon immoralité. C'était du homard, il aimait et je me fis engueuler.

Moralité : La loi, lorsqu'elle insulte l'insouciance d'une probable victime, transforme cette dernière en consciente criminelle.

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