Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
je vis, je dis, je ris ...ou pas
15 mars 2013

La laïcité papabile

Habemus papam.

Voilà que se pose en mon cœur un déchirement miséricordieux entre mon souci de rester neutre religieusement, à défaut de l’être politiquement, et mon éducation qui m’a valu d’être déposée sur les fonts baptismaux dans toute l’insouciance de mes premiers émois (et premiers ébats : pleurant de me retrouver dans des mains inconnues (ma mère, mauvaise langue, dirait que, durant mes premières années, elle ne se souvient pas d’un instant où mes cils n’étaient pas bordés de larmes, ruisseau intarissable plus fiable qu’une source miraculeuse), je me serais transformée en poisson aux écailles glissantes et j’ai échappé de peu , grâce à un prêtre demi de mêlée, aux limbes et à l’obscurité éternelle. Mon talon a, par contre, plongé dans le vin de messe, ce qui me vaut aujourd’hui une vie antioxydante et à cardiovasculaire plat.) : dois-je me réjouir d’un Alleluia glorieux ou dois-je méditer sur l’aveuglement constant des hommes face au néant qui les attend, après une dure vie de lamentations et de destructions, où leur plus grande espérance est de gagner au loto ?

 J’avoue que les précédents papes, une fois leur nomination annoncée avec une épidémique hystérie médiatique, m’ont fait frémir lorsque j’ai aperçu leur frêle carcasse, dont la tête hochait au rythme d’une psalmodie traduite par les désirs de chacun, et dont les doigts recourbés  s’accrochaient à la beauté du monde en s’appuyant sur un sceptre émoussé par les conspirations et les tractations.

 Et puis j’entends Marc Blondel, ancien chef syndicaliste (syndicat : structure visant à défendre les droits des personnes acceptant de cotiser, et de ne pas s’étonner s’ils sont laissés à eux-mêmes une fois licenciés), président de la Fédération nationale de la Libre pensée, défendre la laïcité en plaignant ses pauvres gens infoutus de se contenter d’une retraite accessible à qui sait attendre, pour se complaire dans un illusoire au-delà, où un saint-patron commanderait de simples fidèles à la passivité éternelle. Loin de rester neutre, ce monsieur se fait insultant et se permet d’affirmer l’opinion que sa croyance en l’inexistence de tout sursis post-morbide est supérieure à celle qui parade sur tous nos écrans, avec force encensement et délire surnaturel.

J’insère un extrait de la profession de foi de l’association écrit par cet être de lumière : « Etre libre penseur, c’est avant tout la liaison entre liberté et rébellion. Etre libre penseur, c’est refuser la vérité révélée, c’est être conscient que la vérité progresse en fonction des connaissances, de l’évolution de la société et donc de revendiquer et privilégier la connaissance. Bien entendu, et chacun l’aura compris, c’est refuser l’obscurantisme, le dogme et ce qui en découle, l’intolérance. » M. Blondel, votre vérité ne vous a peut-être pas été révélée, merci alors de ne pas la révéler à d’autres.

Et puis, survient la polémique habituelle sur le passé du pape, sur ses agissements durant une période sombre du pays dont il est originaire (la spiritualité n'a pas de patrie, mais les spiritueux, si. Parenthèse n'ayant aucun rapport avec le corpus du texte, mais autant boire les mauvais jeux de mots jusqu'à la lie et prier pour que ceux-ci soient drôles. Il y en a bien qui trouve Laurent Gerra comique... et certains persistent à prétendre que les miracles sont impossibles sur cette Terre mécréante !).

Tant qu’il est archevêque, un homme peut vivre dans la rédemption ; quand il devient pape, il doit quémander l’expiation. (Tant qu’il est ministre, un homme peut coucher tant qu’il veut ; quand il devient candidat à la présidence, il doit prôner la fidélité et l’abstinence prostitutionnelle ; quand il est président, il est supposé coucher avec tous ceux qui veulent). La presse ne prêche pas le pardon messianique, elle exige l’irréprochabilité pour celui qui préside la conscience d’un milliard d’individus faillibles, se faisant inquisitrice, n’hésitant pas à pratiquer la torture en nous infligeant tout un florilège d’experts sur la dictature en Argentine (pour ma part, j’ai une préférence pour les réparties pertinentes de Mafalda), heureux de se dépoussiérer alors qu’ils se sentaient bafouer par les experts sur le régime opressant de Bachar el-Assad.

Et puis, le nouveau pape est jésuite. J’imagine une longue robe noire soulevée par une démarche pensive, des yeux rentrés à la recherche d’une révélation, un livre coincé entre des mains décharnées et un cœur angoissé, des enfants qui courent, se moquant de cet épouvantail noir, des grand-mères faisant des signes de croix hâtifs, et un front en sueur sous un soleil implacable. Et je vois un vieux pape souriant sur son balcon dramatique, demandant la bénédiction des humbles avant d’affronter les puissants.

Et je me dis pourquoi pas, non pas croire en quelque chose qui me dépasse, mais en faire un billet qui me passe le temps…

L’Eternité, c’est bien…mais on ne saura jamais si la fin est heureuse.

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité