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je vis, je dis, je ris ...ou pas
26 mai 2013

La maladie et ses saints

La maladie devient une obsession :  savoir de quoi on peut, ou pourrait, être porteur pour prévenir la maladie, lui donner le moins de champ possible, éviter la douleur en fait. Bien sûr, par cette introduction, je vise Angelina Jolie qui s'est masectomiée pour diminuer les risques d'attraper le cancer du sein. La peur de la souffrance, de la déchéance, de la perte des cheveux conduit une femme à se couper les seins. Les amazones le faisaient avant pour mieux brandir l'arc contre leurs ennemis ; de nos jours, c'est pour continuer à brandir l'arc de ses reins. Vous me direz les seins c'est accessoire, les hommes peuvent bien s'en passer, sauf sur leurs compagnes, d'où la reconstruction obligatoire pour ne pas décheoir de son statut de sex symbol.

Pour ne pas souffrir un développement inopiné de cellules et continuer à éblouir de son sourire ultra-lucratif  les petits zenfants du tiers monde qui peinent à développer leurs cellules au-delà d'une majorité hypothétique, notre héroïne a sacrifié sa sensibilité ; peut-être également par solidarité avec les victimes des prothèses PIP pour montrer qu'il faut être gonflée de la poitrine pour se frayer un passage dans le monde.

Faut-il avoir peur de la maladie au point de se fendre d'une partie de sa chair et supporter une douleur et une absence qui risquent de peser toute sa vie. Vous me direz (vous m'en dites des choses pour quelqu'un qui ne parle pas beaucoup) un cancer du sein, ça peut en effet faire peser moins lourd, mais les porteurs du cercueil  ne vous en remercient pas pour autant. Vous rajouterez (car vous n'êtes jamais à court d'arguments) que, parfois, vos seins sont tellement douloureux, que cancer ou pas cancer, vous les arracherez bien pour les regarder en face et leur dire que s'ils ont quelque chose contre la gravité ils n'ont qu'à laisser tomber. Et vous conclurez (parce que vous aimez bien avoir le dernier mot) que si cela permet de ne plus être palper, compresser, malaxer et regarder avec un air de "mauvaise période à passer"(pour le docteur, qui doit encore annoncer une mauvaise nouvelle alors qu'il déteste les crises de larmes, pas pour vous qui allait vous amuser à des hauts et des bas dignes d'un super parc d'animation gràce auquel vous allez enfin pouvoir prouver devant les yeux incrédules la solidité de votre couple - suivant ainsi la mode qui consiste à officialiser sa relation en allant faire un tour de manège (si vous supporter les vomis de votre compagnon, c'est pour la vie !)), autant tout couper : parce qu'après la poitrine, déceleuse d'une vérité probabilitairement malfaisante, vous vous mettrez à suspecter vos ovaires, qui recélent également des moyens de vous faire hurler, puis vos poumons qui inspirent des millions de bactéries dont on ne sait jamais pour quel camp elles jouent(pas les footballeurs qui, eux, ont arrêté de jouer depuis longtemps), puis votre peau qui peut entrer en contact avec des milliers (j'ai pas compté alors pour ne pas faire de la surinflation en période économique difficile, je modère mes alarmes) de virus dont certains, effrayants, peuvent occasionner plus de deux morts dans le monde, vous virez à la Mickael Jackson et vous enfermez dans un caisson en espérant qu'aucun avion ne vienne s'écraser sur le bunker que vous avez creusé dans une île déserte seulement alimentée par des personnes sûres et habilitées à ne pas nourrir de maladie contre vous.

Ce qui nous amène au problème de la maladie mentale. Car si nous suspectons le moindre tiraillement ou éternuement d'être le début de la fin (qui a pourtant déjà établie par votre certificat de naissance) de notre corps, dont nous aimons la souplesse et l'intégrité (sauf donc à le tronquer de quelques zones érogènes sans répercussion prolongée sur le plaisir masculin), nous avons vite fait de considérer une réaction quelque peu disproportionnée par rapport à un stimulus donné comme un début de dérangement.

Ainsi si je pleure lorsque je regarde le bas de mon bulletin de salaire parce qu'il baisse chaque année ; je souffre certainement d'une paranoïa anti-patronale qui doit être soignée par une bonne poignée de mains et mon nom prononcé sans hésitation lors du diner organisé par l'entreprise chaque fin d'année.

La nouvelle édition du manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5) essaye de dresser un inventaire exhaustif à la Prévert de tous les torts que notre cerveau peut nous causer, afin de nous obliger à un divorce avec notre raison raisonnée. Si vous êtes normal, dès la première page vous devez souffrir de tous les symptômes décrits : vous avez tendance à lire plusieurs fois la même ligne d'un livre pour comprendre ce que l'auteur a voulu signifier dans sa prose soulignée comme styliquement expressivo-narratatoire par la presse unanime, vous souffrez d'un scepticisme littéraire. Vous êtes scotché toute la journée devant youtube à rire devant des vidéos de jeunes humoristes hyper tordants, dont vous ne vous interrogez jamais sur le devenir, puisque d'autres viendront renverser l'ordre de votre top 10 du lundi (qui devient le top 10 du mardi, puis le top 10 du mercredi etc...), vous souffrez d'immaturité neuronale. Vous avez oublié de fêter la fête des mères, vous souffrez d'une ingratitude congénitale (à moins que ce ne soit d'une incapacité à discerner les conséquences d'une omission fondamentale, ou d'une névrose post-natale annualisée qui se caractérise par des suées abondantes et une paralysie du compartiment droit de votre portefeuille dès que vous approchez d'un fleuriste).

Vous êtes timide, vous devez vous soigner (pour cela, vous pouvez toujours passer à la télévision, au moins votre suicide parlera pour vous) ; vous ne pouvez effectuer plus d'un tâche à la fois, soit vous êtes un homme et on vous reprochera juste d'être trop perfectionniste, soit vous êtes une femme et on vous conseillera de vous couper les seins pour que cela ne vous handicape pas trop.

Bref, si l'on cherche bien, on peut être tous malades et avoir besoin d'un traitement plus ou moins virulent ; ce qui aura pour effet secondaire d'avoir de quoi engager une conversation suffisamment passionnante, en comparant les symptômes, les médicaments et les heures d'interventions (ex: d'accord tu as hérité du gène xw12 qui peut déclencher un herpès, une luxation de la hanche ou une déventilation corénarienne, mais moi je souffre d'une tante hyper protectrice qui m'occasionne des délires de bisounours...). Et puis on aura comme ça toujours un ami, collègue, oncle, voisin atteint d'un truc quelconque, ce qui nous permettra de s'établir en expert es complication et dénigrement des médecins.

 

Moi, la seule question qui me taraude (je souffre de fatalisme m'enfoutiste), c'est : quel est l'avantage de mourir en bonne santé ? Vous me répondrez (car vous souffrez d'une tendance à me porter sur les nerfs) que se soigner permet de vivre plus longtemps et de savoir si Brad Pitt va se couper la barbe pour soutenir Angelina...

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