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je vis, je dis, je ris ...ou pas
5 septembre 2014

Jouissons de notre VDM

La bonne résolution pour la rentrée semble être de passer plus de temps avec ses enfants. Et la bonne injonction être : booster votre carrière !

Outre la difficulté de concilier l'être et le pouvoir, outre le problème de donner envie à vos enfants de passer plus de temps avec vous, outre l'humiliation de considérer votre métier de coiffeur, dans lequel vous vous épanouissez, comme dévalorisant, il semble acquis que, qui que vous soyiez, quoi que vous fassiez, vous vous devez d'être insatisfait et de vouloir changer quelque chose sur votre personne, ne serait-ce que votre forfait de téléphone, lors de n'importe quelle étape prétendument signifiante de votre vie.

En janvier, maigrissez grâce au régime détox, en février, arrêtez de fumer, en mars, changez de mec, en avril, changez de lunettes, en mai, gagnez au loto, en juin, créez votre entreprise, en juillet, maigrissez sans faire de régime, en août, bronzez, en septembre, résiliez votre mutuelle, en octobre, adorez vos rondeurs, en novembre, rallumez la flamme de vos désirs, en décembre, soyez vous-même pour aider les autres.

Les impératifs fusent et votre ego se fissure. L'insatisfaction peut être source d'émulation, à condition de savoir ce qui peut apporter satisfaction.

Plutôt que de bouillir intérieurement de frustration

de culpabiliser de s'ennuyer avec ses enfants, de ne pas les avoir inscrits à la bonne maternelle, de n'être que secrétaire, de ne chausser que du 36, d'habiter dans une cave (bien que là, il semble plutôt opportun de vous enfuir dès que votre kidnappeur vous en donne l'occasion), de louper toutes les recettes faciles de Cdugato.com, de grossir en couple

ou de mal digérer d'être seul, de gagner plus d'argent que votre conjoint, de ne pas payer d'impôts, de ne pas toucher la prime pour l'emploi, de ne pas pouvoir dormir sans une bonne dose de somnifère ou sans regarder l'émission "chasse en heure trouble", de ne pas supporter Arte plus de 10 mn,

de se réfugier dans la drogue, l'alcool, les séries, la mode, les bras d'un amant d'un soir, derrière les interphones et son profil visagedelivre,

de compter les amis, les calories, les heures supplèmentaires, les heures de colle,

pourquoi ne pas s'arrêter d'écrire des phrases à rallonge et prendre le temps d'une bonne tasse de thé.

Assortis de commentaires, envahis d'informations, obligés d'être performant, unique, égalitaire, schizophrène, nous plongeons dans la morosité.

Rangeons calculette, connexion, nombril et pendant 5 m, cessons de vouloir être ce que nous voudrions être ;

assumons d'être ce que nous nous sommes faits ;

 arrêtons de fixer la cause de nos malaises sur nos parents, les autres, dieu, la mort, la téléréalité, la mondialisation, la perte à 6 mois de son doudou préféré, le chomage, la crise, le faux prince charmant, le vrai pince sans rince, les gosses pourris, la mayonnaise ratée 

et admirons le chemin parcouru : du spermatozoïde qui est sorti gagnant au visage fripé devant la glace qui a réussi à se faire une place, même si ce n'est que sur le canapé.

Même celui qui se croit au plus bas échelon social remporte une victoire à chaque fois qu'il ouvre les paupières : il voit le monde, il le fait exister. Pour le contrôler, il ferme les yeux (ou lui demande ses papiers).

Regardons - nous, adulte, responsable, nous sommes peut être petit, moche, ne gagnons pas 5 000 euros par mois, ne sortons pas avec Leonardo de Caprio (qui pourtant essaye de changer régulièrement de partenaire), ne souffrons pas d'être un fils de, ne savons pas envoyer un sms ni tricoter un cartable en macramé, n'avons pas vu le Titanic ni un film de Julie Gayet (mais ça, c'est normal), détestons le parfum, le vin, les fruits et les légumes et le chat du voisin...

Et alors !

J'ai peut être une vie de merde, mais, moi au moins, je peux, si je le veux, déjeuner en paix.

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