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je vis, je dis, je ris ...ou pas
25 juin 2010

Mots tabous qui mettent à bout

Aujourd’hui, conférence de Dr Jivego Denlemur sur les mots tabous :

Certains mots, anodins, candides, figurant dans les pages blanches et non censurées du Petit Robert (et grand repère), se révèlent intrinsèquement mal armés (surtout proférés un soir par un aphone) pour être dégoupillés et jetés à la cantonade. La déflagration produite cause d’irrémédiables dégâts non pas sur les collatéraux mais sur l’apparence insignifiante de l’émetteur. Ce sont des vocables innocents qui, une fois extirpés d’une bouche incapable d’en mesurer les conséquences, suscitent sourires grivois, coups de coude suggestifs, clins d’œil lascifs ; le public pouffe et le monologuiste rougit.

Je pense à un mot en particulier. Ce mot s’avançant dans toute sa chasteté fera se tortiller de jeunes boutonneux s’imaginant s’en resservir une louche nocturnement une fois sanglés dans leur lit où les pollutions ne seront alors plus seulement sonores ; fera que des adultes ayant depuis longtemps dépassé l’étape de la crainte de la surdité allongeront leur cravate de façon à cacher leur soudaine élasticité ; fera que des femmes se sentiront déshabillées, souillées, trop ouvertes aux allusions suggérées.

Ce mot, malheureusement, j’en ai un spécimen à la maison et ma fille en a été victime, de part sa trop grande disposition à répondre aux questions malines, comblant ainsi les fantasmes naissants de ses camarades. Maintenant, elle est condamnée à soutenir, malgré la pression de bambins précoces qui ne savent se contenter de satisfaire leurs aspirations salaces en lorgnant des films pornographiques, que le seul animal qu’elle possède est un chat femelle.

J’ai honte d’avouer que la signification seconde (et qui met par ailleurs en état second) de ce mot, si mignon lorsqu’il se contente de décrire un animal touffu aux couleurs chatoyantes, au ronronnement apaisant, à la tiédeur câline, aux effluves subtiles, ne m’a pas effleuré avant mon …. (je ne saurai parler de puces dans un texte sur les chats)…..bien après 10 ans en tout cas et je ne me souviens pas que mes camarades alors tentaient de prendre au piège les damoiselles par de sordides histories de double sens. Ils se contentaient de tenter d’apercevoir ce qu’elles cachaient sous leur jupe….

D’autres mots sont touchés par cette prophylaxie qui consiste à éviter de les prononcer sous peine de propager une crise de rire inextinguible. Le mot « sucer » doit être susurré sous peine d’allumer des lumières paillardes dans les yeux (et ailleurs) ; le verbe « habiter » au présent peut susciter l’imagination débridée de gens habituées à manipuler les liaisons. Un petit substantif, injurieux ou affectueux selon le ton et la manière dont il est prononcé, est devenu avec le temps relativement à l’abri de son sens premier de connotation sexuelle et les gosses le manient facilement sans prendre conscience qu’ainsi non seulement il traite le protagoniste de débile profond ou de bêta pas malin mais que j’aime bien quand même malgré ses défauts assez consistants, mais également fait allusion à ce que le chat femelle exprime mieux. Ce mot de trois lettres commence par C et finit par N.

Il a été beaucoup utilisé récemment par des supporters dépités pour traduire leur désillusion d’une façon fleurie bien que répétitive, face à des footballeurs censés représentés la France mais surtout occupés à conclure la phase finale de leurs contrats publicitaires. Bien qu’avec cet exemple, le terme retrouve une certaine dimension érotique puisqu’il est difficile de faire allusion à un bleu sans que surgisse une péripatéticienne….Certains bataillent pour que l’ancienne acception physiologique reprenne du poil de la bête et perde son caractère injurieux. Ainsi Georges Brassens dans « Blason » :

Mais le pire de tous est un petit vocable
De trois lettres pas plus, familier, coutumier
[…]
Honte à celui-là qui, par dépit, par gageure,
Dota du même terme en son fiel venimeux
Ce grand ami de l’homme et la cinglante injure
Celui-là, c’est probable, en était un fameux.
[…]
La male peste soit de cette homonymie !
C'est injuste, Madame, et c'est désobligeant
Que ce morceau de roi de votre anatomie
Porte le même nom qu'une foule de gens.

Et j’ajouterai : « et qu’elle se promène sur tous les toits

du fait qu’un félin malicieux quoique courtois

se soit vu investi d’en figurer, par un matois,

un mystère évocateur qui laisse pantois. »

(j’ai évité la rime avec putois)

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