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je vis, je dis, je ris ...ou pas
3 août 2010

Toujours prête à souffrir

Ils sont là, ils sont partout !

Quand vient l'été, surgissent de partout, de petits êtres bariolés, affligés d'un sourire permanent qui vous rend captifs et vous pousse à accomplir des exploits involontaires. Plusieurs castes existent, se distinguant de par leur couleur. Vert, bleu ou beige, ils se reconnaissent entre eux grâce à un talisman qu'ils portent autour du cou. Ils communiquent avec la nature en la sillonnant de part en part, s'abreuvant au passage de la sueur de pauvres quidams à qui ils demandent assistance.

Ils s'approchent doucereusement, leur fétiche endormant la méfiance de la proie ; celle - ci, sereine, abaisse ses armes et se laisse dépouiller de son libre arbitre.

J'ai été la victime de ses êtres malfaisants.

Je travaillais hardiment à mes mots croisés, lorsque retentit, dans un silence prophétique, un carillon apocalyptique : le téléphone ! Désarçonnée, je décrochais à la première sonnerie, ce qui m'arrive rarement, pour ne pas faire croire à mon interlocuteur que je n'espérais que son appel pour réchauffer une journée bien morne. Une petite voix féminine sortit des limbes du combiné pour m'ensorceler et faire appel à ma générosité.

Ils étaient en perdition. Partis en excursion sauvage, une de leur membre avait chuté et ne pouvait continuer à pérégriner avec eux. Comme ils n'avaient pas le coeur ni de l'immoler ni de la cuisiner, ils avaient essayé de joindre sans succès leur responsable et maintenant ils recherchaient les coordonnées de personnes à même de prendre en charge la blessée. Je leur fournis tout un annuaire mais leur plan était diabolique : ils revenaient sans arrêt sonner à mon oreille, prétextant que leurs multiples appels restaient sans réponse.

Et mon coeur se fendit. Inconsciente, je décidais (ou je crus que je décidais) d'aller secourir la damoiselle en détresse. Je fermai mon bureau, trois quart d'heure avant l'heure de relâche et partis tel un peu ou prou chevalier, dans mon fidèle tacot. Après une vingtaine de kilomètres, j'arrivai sur le lieu du traquenard. La donzelle était bien là, allongée sur une table de pique - nique, bandée de ci de là pour donner le change. Elle grimaça comme il convient quand il s'est agi de se relever pour atteindre mon ferreux destrier. Aidée de ses congénères, elle prit ses aises sur le siège passager, sans avoir au préalable soigneusement essuyé les restes humains (les miettes d'un goûter copieux). Une autre s'installa à l'arrière. J'étais cernée.

Et le couperet tomba. Les sourires de ces êtres sans scrupule s'élargirent et ils m'obligèrent à dévier ma route. A l'aide de paroles caressantes, de propos cajoleurs et de remerciements incessants, ils me persuadèrent de conduire l'estropiée non pas jusqu'à mon point de départ mais à encore une vingtaine de kilomètres de là. Je n'eus point la force de leur résister. Ni mon coffre qui constata ses limites lorsqu'il lui fallut héberger le vélo cause de la chute bancale de cette histoire.

Ma monture criait famine et je dus la ravitailler. Ignorant les coutumes du coin, je m'approchai de pompes solitaires dont les chiffres effarants me firent me renâcler. Mais j'étais ferrée et je dus m'acquitter d'une somme à combler un déficit abyssalement creusé par un président aux abois.

Mon avancée fut périlleuse, tant à cause d'une tenue de route hasardeuse que d'un troupeau de tracteurs décidés à empêcher toute velléité de dépassement par une occupation outrepassière du domaine public. Et mes farfadets rigolaient, rigolaient....

Nous arrivâmes enfin au point final de mon épopée (sans compter le retour) : un camping désert à faire peur au campeur le plus aguerri. Et mes lutins exaltaient, exaltaient. Je m'empressais de les quitter, heureuse de m'échapper de leur gentillesse poisseuse.

Revenue à bon port, le panache en berne, j'appris que durant mon absence, maints administrés avaient buté en vain contre une porte close, refusant obstinément de s'ouvrir. Mais je ne pris point le temps de me désoler sur ce destin implacable qui ne vous fait regretter que lorsque vous êtes absent et vous permet de n'en recevoir que les torts lorsque vous êtes présent. J'effaçais rapidement toute trace de mon existence afin de me réfugier au plus vite dans mon cher foyer, sursautant à chaque bruit suspect, craignant à tout moment de revoir jaillir ces faces hilares.

Et encore maintenant, je ne peux m'empêcher d'être saisie d'effroi lorsque je devine au lointain une silhouette suspecte, laissant préjuger l'approche d'une espèce de korrigan espiègle, prêt à vous jouer un mauvais tour.

Depuis, oui, vraiment, je hais les scouts....!!!!.

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